PFAS 7 : Bâle et l’Euroairport sollicités

Contexte : Des choix qui engagent l’avenir

Depuis que nous avions appris en janvier 2024 que l’eau potable était gravement polluée par Bâle-Mulhouse, 3ème aéroport fédéral Suisse (Berne a délégué la direction opérationnelle de l’aéroport au Canton de Bâle, qui est en même temps co-propriétaire), et que nous étions au fait du système de production et de distribution très performent d’EDCH des services cantonaux IWB (Industriewerke Basel), nous pensions que raccorder SLA à l’eau de Bâle de très bonne qualité, était une option à étudier. Ce que nous avons suggéré au Comité de suivi le 25 avril 2025. Entre temps, cette idée était également reprise par d’autres. Voir les articles des journaux L’Alsace et la BZ, Basellandschaftliche Zeitung.

SLA et les autorités rejettent cette solution ; trop chère, trop compliquée et trop tard à cause de la DSP avec Véolia. Mais à ce stade, a-t-on vraiment étudié les différentes solutions et ont-ils seulement essayé ? Selon le journal bâlois BZ, « Aucune demande n’a été formulée par les autorités municipales françaises pour le moment ».

Rappelons les inconvénients des mesures prévues :
– dans le cadre de la lutte contre toutes les pollutions (les cas sont de plus en plus nombreux), la France s’oriente à l’avenir vers une solidarité financière entre tous les territoires en mettant à contribution les contribuables et les consommateurs (on oublie le pollueur payeur).
– les surcouts seront financé à partir de 2026 par une augmentation du prix de l’eau distribuée au consommateur,
– à ce titre les autorités imposent à l’Agence de l’Eau Rhin-Meuse, AERM, une contribution de 1,5Mio€ pour la dépollution de l’eau à Saint-Louis, alors qu’elle intervient uniquement pour la prévention
– sous la pression la participation financière « volontaire » de l’aéroport monte 10 Mio€, mais les autorités ne veulent pas demander plus au pollueur ; on ne veut pas froisser ses amis suisses !
– SLA, qui représente ses administrés, devrait logiquement porter plainte contre X au titre du préjudice subi. Mais il semble qu’on ne puisse rien à attendre de ce côté-là.

Rappelons aussi que les études sur la localisation exacte des sources de pollutions, le confinement et la dépollution sont encore en cours. Inévitablement, le traitement de la contamination des puits de captage et la préservation de l’eau souterraines pour les besoins futur entrainera des couts importants sur le long terme.

(Note : La CEA avait participé à aux Assises Rhénanes de l’eau du Rhin supérieur le 19 mars 2024 à Muttenz, qui portait sur la production de l’eau potable par IWB ! Ne se serait-ce pas une opportunité pour mettre en œuvre un travail commun sur l’eau. La pollution ne s’arrête pas aux frontières. Nous sommes une même communauté de destin interdépendante.)

Assises-Rhenanes-Eau-2024

 

 Article dans L’Alsace

Pollution aux Pfas : Bâle tire son eau potable du Rhin

« L’eau qu’ils boivent est prélevée dans le fleuve et coule au robinet après un long chemin – et, notamment, un traitement naturel dans les alluvions de la Wiese, dans la station des Langen Erlen. »
De l’eau suisse pour Saint-Louis ?
« Quand la contamination de l’eau potable par les Pfas, pour une bonne partie des habitants de Saint-Louis agglomération (SLA), a été connue , une idée a émergé. Pourquoi ne pas fournir de l’eau potable bâloise au réseau ludovicien ? Car il n’y a pas de Pfas dans les robinets bâlois, assure Thomas Meier, directeur de la production d’eau potable. »
L’Alsace, J-Ch. Meyer, 3.07.25

 Article dans la BZ (extrait, traduction sans garantie. A lire attentivement jusqu’ä la fin)

Eau potable toxique en Alsace, pourquoi les IWB n’aident pas leurs voisins à s’en sortir ?

En Alsace, l’eau potable est fortement contaminée par des substances chimiques cancérigènes. Bâle pourrait vraisemblablement apporter son aide.
Pour les communes alsaciennes, la nouvelle d’avril a été un choc : les autorités ont découvert des concentrations élevées de PFAS, substances chimiques difficilement biodégradables, dans l’eau potable. Depuis mai, l’eau du robinet est interdite aux femmes enceintes, aux jeunes enfants et aux personnes gravement malades. Dans les onze communes concernées, 60 000 personnes se sentent en danger. Le poison aurait pénétré dans les eaux souterraines par l’intermédiaire de la mousse anti-incendie utilisée par les pompiers de l’EuroAirport pendant des années, jusqu’en 2017. Martin Dirrig, aubergiste à Hegenheim, du restaurant Le Bœuf Rouge, a indiqué à la radio régionale SRF avoir déjà reçu un courrier en 2023. Il y était indiqué qu’il lui avait été conseillé de cesser de servir l’eau du robinet à ses clients.

Réactions trop tardives.
Ce n’est que bien plus tard que les autorités du Haut-Rhin ont actionné le frein d’urgence et ont informé l’ensemble de la population au printemps (janvier 2024). Des mesures prises fin 2023 montrent que la concentration de PFAS dans la région de Saint-Louis atteint jusqu’à 0,43 microgramme par litre, soit 4,3 fois la limite autorisée (0,1μg/L).

À Bâle, les eaux souterraines sont également fortement contaminées par des substances chimiques contenant des PFAS. Cependant, l’eau potable de la région ne provient pas des eaux souterraines, comme en Alsace, mais du Rhin. L’eau est pompée dans les forêts du Hardwald et du Langen Erlen, elle est filtré dans le sol forestier et peut ainsi être traitée selon des standards élevées.
Les substances chimiques périssables présentes dans l’eau potable de Bâle sont bien inférieures à la limite.
Ce journal a récemment rapporté que les services public de l’eau, IWB, augmentent leur capacité d’approvisionnement en eau potable dans la forêt de Langen Erlen afin de faire face à la croissance démographique.

La solution est évidente : ne serait-il pas relativement simple de raccorder le réseau d’eau potable alsacien à celui de l’IWB et de résoudre ainsi le problème des PFAS dans les communes concernées ? En réponse à une demande d’information, l’IWB écrit : « Techniquement, ce serait certainement possible. Cependant, le raccordement du réseau d’eau potable nécessiterait davantage d’efforts et des clarifications supplémentaires. » Aucune demande n’a été formulée par les autorités municipales françaises pour le moment. Les IWB sont disposées à étudier un projet correspondant si les autorités alsaciennes les contactent.

Pascale Schmidiger, maire de Saint-Louis, reste muette lorsqu’elle est contactée, révélant seulement que l’option du raccordement au réseau bâlois avait été envisagée par la communauté d’agglomération. « Il s’est avéré que cette solution est très complexe, longue et coûteuse.» Cependant, l’alternative risque d’être beaucoup plus longue. Ces produits chimiques, pratiquement non dégradables, risquent de contaminer les eaux souterraines de la région de Saint-Louis pendant plus de cinquante ans. Les autorités françaises ont annoncé un programme de 20 millions d’euros pour le traitement de l’eau potable par filtration à partir de 2026. Une mission majeure pour Veolia, qui s’étendra sur plusieurs décennies.
Dans un premier temps, les autorités avaient annoncé que les coûts supplémentaires seraient répercutés sur la population et partiellement couverts par une augmentation du prix de l’eau.

Après une vive résistance, il y a eu un revirement. Désormais, l’EuroAirport et l’État doivent prendre en charge ces coûts supplémentaires. La répartition des coûts est en cours de négociation, comme l’a rapporté la chaîne régionale SRF.

Le canton de Bâle-Ville, en tant que copropriétaire de l’EuroAirport, porte également sa part de responsabilité. En tant que propriétaire d’IWB, il pourrait proposer une aide proactive à l’Alsace. Cependant, le Département de l’Économie, des Affaires sociales et de l’Environnement (DAE), dirigé par le conseiller Kaspar Sutter, s’est refusé à tout commentaire. Le DAE a déclaré que le problème concernait l’EuroAirport.

Titre original : « Die IWB hätten ein Gegengift » : Giftiges Trinkwasser im Elsass, warum helfen nicht die IWB den Nachbarn aus der Patsche?
BZ (Basellandschaftliche Zeitung), Yann Schlegel, 12. Juli 2025

Visite virtuelle de la production d’eau potable dans le Hardwald. Accéder à la présentation ici.

 

L’actualité PFAS en bref :

L’eau est un droit, pas un poison. Défendons-la ensemble ! Alsace Nature

Financement et responsabilité : Les positions évoluent

« Le chantier de dépollution du réseau d’eau potable de Saint-Louis Agglomération se poursuit cet été pour installer les unités mobiles de traitement censées ramener les taux de PFAS en-dessous des normes réglementaires d’ici l’automne prochain.
L’aéroport se dit prêt à mettre la main à la poche, mais sans indiquer de montant pour l’instant. Les négociations sont en cours, aucun chiffre ne nous a été communiqué.
« Nous espérons avoir une aide qui pourrait tout couvrir », défend Thierry Litzler, nous ne sommes pas responsables de la pollution. Nous la subissons, comme nos administrés, donc nous cherchons un maximum de partenaires financiers, dans la discussion, la négociation. Il n’est pas question d’aller au tribunal mais il n’est pas question non plus pour nous d’accepter n’importe quoi. »
Le seul montant qui a été évoqué est la somme de 10 millions d’euros, mais l’aéroport le réfute.

Il apparaît dans un communique de presse de l’Agence Rhin-Meuse publié en juillet dernier, où elle fixe des conditions au versement de sa propre participation : « Cette aide est conditionnée, notamment, au respect des engagements financiers des autres partenaires, notamment l’exploitant de la zone aéroportuaire, qui prendra en charge jusqu’à 10 millions d’euros. » »
France Bleue Alsace – ICI, 21.05.25

 

A Saint-Louis, les pollueurs de l’eau épargnés, les contribuables sommés de payer

Début mai, l’État a restreint la consommation de l’eau autour de Saint-Louis à cause d’une trop forte présence de polluants éternels. En l’absence de démarche juridique contre les responsables, les riverains et des budgets publics prendront en charge des millions d’euros de dépenses nécessaires…
En Europe, le principe de pollueur-payeur impose théoriquement aux acteurs de prendre en charge les coûts liés à leurs pollutions. Cela permet d’éviter que des entreprises ne se sentent en droit de dégrader des ressources sans que cela ait des conséquences pour elles. Et que des citoyens se retrouvent à payer pour des contaminations dont ils ne sont pas responsables.
« Il nous apparaît que, tant la plateforme aéroportuaire que les producteurs des produits, les organes ayant autorisé l’utilisation et plus largement l’ensemble des acteurs qui ont, au cours des années, rendu possible cette pollution des puits captant, doivent aujourd’hui prendre leurs responsabilités dans l’effacement de la source de contamination et dans la recherche de solutions pour permettre aux citoyens du bassin de Saint-Louis de retrouver, au plus vite, une eau potable de qualité. Alsace Nature ».
Rue89 Strasbourg, Thibault Vetter, 22.10.25

 

Pollution de l’eau potable : le compte n’y est pas

Nitrate, pesticide, PFAS et bientôt les TFA, la France ne protège pas suffisamment ses citoyens. Ceux-ci font savoir leurs revendications à travers la pétition contre la loi Duplomb.

Voir les arguments contre la loi Duplomb : Bon Pote, par Philippe Grandcolas, directeur de recherche au CNRS)


Les signatures contre la loi Duplomb sur le site de l’AN avaient dépassé le million le 20.07.2025 à 16h51 ! Vingt quatre heures plus tard le compteur atteint 1 500 000 !

 

La France, mauvais élève en environnement et santé

La France une nouvelle fois mise en demeure de respecter la directive européenne
« La Commission européenne a mis en demeure la France, ainsi que l’Irlande et la Slovénie, de se conformer à la directive européenne sur l’eau potable, un règlement pour lequel l’Hexagone avait déjà été pointé du doigt. « La Commission européenne a décidé d’ouvrir des procédures d’infraction en envoyant des lettres de mise en demeure à l’Irlande, à la France et à la Slovénie, au motif que ces États membres n’ont pas transposé correctement la directive relative à l’eau potable ». En ce qui concerne la France, « il s’agit de l’évaluation des risques des installations privées de distribution, de la surveillance de la qualité de l’eau potable et des informations obligatoires à fournir au public ».

La refonte de la directive relative à l’eau potable vise notamment à améliorer la protection de la santé humaine grâce à des normes de qualité de l’eau actualisées, qui ciblent les polluants préoccupants, tels que les perturbateurs endocriniens et les microplastiques, et visent à ce que l’eau du robinet soit plus propre.

Les États membres étaient tenus de transposer la directive pour le 12 janvier 2023. »
Ouest France avec l’AFP, 18.07.25 (cet article concerne surtout les nitrates)

 

Effet cocktail : quelle est la toxicité d’un mélange de polluants ?

Pesticides, résidus de médicaments, métaux lourds, composés perfluorés… D’un point de vue strictement écologique, les organismes ne sont pas exposés à une seule substance chimique à un temps donné dans l’environnement, mais le plus souvent à des mélanges complexes de contaminants à plus ou moins à faibles doses. Or, les recherches en écotoxicologie ont montré que la toxicité de ce mélange de substances chimiques était généralement plus élevée que la toxicité individuelle la plus forte (Kortenkam et al., 2009) : on parle d’« effet cocktail » ou d’« effet combiné ».
Ecotoxycologie.fr

 

PFAS et dépollution de l’eau : les pistes actuelles pour traiter ces « polluants éternels »

Aujourd’hui, outre mieux réguler leur utilisation, il faut de meilleures pistes pour traiter ces polluants, c’est-à-dire d’abord les extraire de l’environnement, puis les détruire. Un véritable défi puisque ces molécules sont à la fois très variées et très résistantes – ce qui fait leur succès.
The Conversation, 16 juillet 2025

 

En-tête : Photo Wikimedia Creative Commons, Norbert Aepli, Switzerland