Un raccordement ferroviaire pour faire décoller l’Euroairport ?

La lettre d’information « EAP by Rail » distribuée récemment dans les boites aux lettres relance la question de l’extension sans limite du trafic à l’Euroairport.
Plus d’information sur : Nouvelle Liaison Ferroviaire, NLF

Déjà en 2013, l’ADRA mettait en garde contre ce projet, dont les répercussions considérables vont bien au-delà des 6km de rail entre Saint-Louis et l’Euroairport.
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On ne vous dit pas tout !
Principal opérateur de l’Aéroport binational, le Canton de Bâle-Ville joue un rôle majeur dans ce projet avec au final, le raccordement de l’Aéroport au réseau ferré grandes lignes suisse. En effet, avec son autre projet de liaison ferroviaire sous la ville dite « Herzstück », Bâle veut relier la gare CFF/SBB, la Badische Bahnhof et la Gare Saint-Jean pour permettre les liaisons directes entre l’Euroairport et les grandes villes suisses, dont Zürich.
La Confédération prévoit en effet dans son Plan Sectoriel d’Infrastructure Aéroportuaire (PSIA), une augmentation de plus de 50% du trafic avec 147.000 mouvements à l’horizon 2030, contre 95.500 mouvements en 2016.
Source www.agglobasel.org/pressespiegel.html

Une liaison écologique ?
Selon l’ADRA, ce projet est problématique pour plusieurs raisons :
D’abord son coût estimé en 2010 à 220 millions d´euros et dont la rentabilité annoncée ne tient pas compte du coût environnemental et sanitaire qu’engendre l’augmentation du trafic.
Des liaisons par bus, gare de Bâle-Aéroport et gare de Saint-Louis-Aéroport existent et sont performants. En plus la prolongation du Tram 3 a été actée récemment.
En comparaison, les aéroports français plus importants comme Marseille-Provence, Toulouse-Blagnac et Nice-Côte d’Azur, n’ont pas de liaison directe par le train non plus.
Il faut aussi se rappeler que la liaison TER Mulhouse-Frick a été abandonnée par la SNCF, la CCF (et Bâle) en 2008 pour jeter des milliers de frontaliers sur la route. Pendant 10 ans elle a permis une liaison binationale directe sans changement à Bâle. Maintenant qu’on a saturé les routes, il faut logiquement un grand projet couteux et prétendument écologique.

Ensuite, l’extension de la zone de chalandise liée au nouveau raccordement s’étend clairement au-delà de Strasbourg, Offenbourg, Zürich, Fribourg et Besançon. Ainsi Bâle-Mulhouse, n’est plus un aéroport régional au service de la Regio Trirhena, mais vise à devenir avec des liaisons intercontinentales Low Cost et toujours plus de fret, une alternative à Zurich-Kloten arrivé à saturation et qui est fermé de 23 heures à 6 heures.
La conséquence directe est l’augmentation des nuisances sonores et des émissions des gaz à effet de serre qui ne pourront jamais être compensées par le transfert local de passagers de la voiture vers le train.

Avec l’ADRA, les associations de riverains allemandes et suisses veulent qu’un éventuel raccordement ferroviaire soit assorti de la mise en œuvre d’une extension du repos nocturne de 23h à 6h, de la limitation des mouvements à 100.000 accompagné de la réduction du bruit après 22h et avant 7 heures, et de la suppression des trajectoires Elbeg de 270°, Lumel et Basud fortement impactantes.
Jusqu’à présent l’Aéroport n’a jamais montré la moindre volonté de satisfaire simplement une des trois revendications légitimes des associations.

Etude d’impact environnementale (Espoo)
Vu l’impact induit à terme, il faut que l’étude environnementale ne se limite pas à compter les fleurs et les batraciens menacés par le tracé. L’ADRA exige que la Convention d’Espoo s’applique.
La Convention sur l’évaluation de l’impact sur l’environnement (EIE), dans un contexte transfrontière dite d’Espoo, stipule les obligations des Parties d’évaluer l’impact sur l’environnement de certaines activités au début de la planification. Elle stipule également l’obligation générale des Etats de notifier et de se consulter sur tous projets majeurs à l’étude susceptibles d’avoir un impact transfrontière préjudiciable important sur l’environnement. La Suisse et la France ont signé la convention.

Ce projet sert d’abord les intérêts suisses, en 2016, 53% du trafic passagers de l’aéroport est en provenance ou à destination de la Suisse. Les bénéfices commerciaux et industriels générés par la plateforme aéroportuaire vont essentiellement à des entreprises Suisses

Bâle investi pour développer la compétitivité de sa métropole. Par contre elle n’en supportera pas les nuisances sanitaires ou environnementales, se limitant purement et simplement à 5-6 survols en journée et interdisant son survol de 22h à 7h.
Pour ce projet transfrontalier réalisé en partenariat, les riverains français sont en droit d’attendre que leur cadre de vie et leur santé ne soient pas sacrifiés.
L’ADRA s’y emploiera en union avec les associations suisses et allemandes.

Quand les projets ne sont pas climato-compatibles !
Ou quand la liaison ferroviaire pose les mêmes questions de fond que le Grand Contournement Ouest de Strasbourg, GCO :
Le projet de CGO est « en totale contradiction avec les grands objectifs affichés par la loi sur la transition énergétique et avec l’esprit de l’accord de Paris.
Par ailleurs, le gouvernement a annoncé la fin de la période des grandes infrastructures, pour mieux se consacrer à l’entretien et la modernisation de celles existantes, et ainsi redonner ses lettres de noblesse aux transports du quotidien. Les opposants au projet aimeraient que cette philosophie soit appliquée localement47 ». Source Wikipedia, Autoroute A355.

Communiqué de Presse: L’Alsace du 30.08.2017

Le Rapport Duron sème le trouble !

(Rapport Duron du Conseil d’orientation des infrastructures sur la Nouvelle liaison ferroviaire de l’aéroport Bâle Mulhouse, Janvier 2018)

Le rapport et le déclassement par Paris de la liaison ferroviaire offusque toute la classe politique et les milieux économiques des trois pays, qui n’ont pas compris l’enjeu des transports, tel que le rappelle Monsieur Duron dans l’avant-propos de son rapport:

« Choisir les déplacements du quotidien, assurer la qualité des infrastructures. La mobilité est confrontée, aujourd’hui, à deux défis majeurs:
La réduction impérative des émissions de gaz à effet de serre, pour atteindre le facteur quatre en 2050.
La maîtrise de ses investissements afin de ne pas aggraver un endettement déjà insupportable. »

Le rapport vient confirmer nos arguments contre la liaison ferroviaire.
Extrait du rapport Duron pages 94-95:
« L’aéroport de Bâle Mulhouse fait partie des plateformes dont la croissance du trafic passagers est la plus forte parmi les aéroports de province (hausse de 95 % sur 2000-2016 à comparer à 50 % pour l’ensemble des aéroports de province). Il est desservi par la route avec des transports en commun performants. La gare ferroviaire de Saint-Louis la Chaussée située sur la ligne Strasbourg-Mulhouse-Bâle est pour sa part distante de quelques kilomètres de l’aéroport et est reliée à ce dernier par une navette. Le projet envisagé vise à créer une desserte ferroviaire directe de la plate-forme aéroportuaire en créant 6 kilomètres de double voie électrifiée en dérivation de la ligne ferroviaire existante Strasbourg-Mulhouse Bâle.
Ce projet est soutenu par la région Grand-Est et le canton de Bâle qui ont en décembre 2017 signé un protocole favorable à son avancement. L’étude socio-économique en cours et dont les résultats seront connus au 1er semestre 2018 permettra de mieux apprécier l’utilité pour la collectivité du projet.
Le Conseil n’identifie pas à ce stade, a priori, un besoin de mobiliser des financements nationaux français dans le cadre de ce projet. Par précaution, un co-financement de 20 % du projet a été inclus dans le scénario 3 en fin de période 2022-2027. »

Restons vigilant, car l’étude continue et la Suisse apportera certainement les sous pour que le projet se fasse, même s’il sera différé.

Les Cantons de Bâle réagissent au rapport Duron

Les Verts de BS et BL aussi, mais pas dans le même sens !
Lire leur lettre à la Ministre des transports